"Ce que veut dire TO de JIPTO, c’est d’abord Tomski, mais la dernière syllabe du sigle JIPTO, acronyme prononçable en mot, comporte un aspect qui n’est ni mathématique ni nominatif. Nous allons voir en quoi il relève plutôt de la définition de la poésie telle que nous la proposons depuis quelques lustres dans nos cours et séminaires. Et nous essaierons de montrer l’intérêt opérationnel de cette caractérisation.
La poésie résulte d’une hyperdensité sémantique, i.e. d’un développement particulièrement intense des significations d’un texte à nombre de signes égal. Autrefois, et c’est sans doute un trait de l’espèce humaine, les poètes étaient aèdes i.e. chanteurs. Il y avait donc toujours chez eux, dans leur langage d’apparat, un double signifiant ou support simultané de signification : le texte et la musique. Celle-ci était en général à la fois vocale et instrumentale : la lyre ou la harpe pouvait servir à ces accompagnements, comme aujourd’hui la guitare pour la chanson. Cela faisait trois supports, avec trois lignes principales de signification, conjuguées en correspondance chronologique et tout à fait à l’opposé du texte qui pouvait, comme tel, être univoque. Or, aujourd’hui, dans la poésie non chantée, l’enrichissement sémantique peut se faire, exclusivement, à l’intérieur du texte, à la faveur de plurivalences sémantiques des supports au niveau de composants (signifiants élémentaires) et surtout à celui de compositions diverses des éléments. Ainsi, du coup, l’enrichissement se fait-il par une polysémie ou plurivocité du texte - éventuellement même par la polydoxie- (R.Pagès, 1985-86; J.-M.Monteil, L.Bavent, M.-F.Lacassagne, 1986) i.e. la pluralité, pas forcement cohérente, parfois contradictoire, d’opinion et/ou de sentiments, que le texte transmet ou suscite.Il est donc tout à fait intéressant à cet égard de voir que le titre de l’instrument culturel crée par Tomski comporte, suivant la déclaration expresse de l’auteur, une signification seconde dans laquelle nous voyons un effet de polysémie. Par elle-même et délibérément, elle ouvre la porte de l’ambiguïté, et en annonce la légitimité, en rompant avec la clause généralement convenue d’unicité de sens. Car si -TO dans JIPTO signifie bien Tomski -ce qui souligne l’individualité de l’initiative et le droit d’auteur- il indique aussi la destination, le caractère universel et non singulier de l’instrument culturel : il est pour tous, TOus : des enfants de la maternelle aux adultes chercheurs, i.e. jusqu’au sommet de la culture. Cette signification seconde, explicitée par G.Tomski, figure littéralement dans le sous-titre qui suit JIPTO : Jeux de réflexion pour tous. TOus.
Il y a un autre sens que le Prof. Tomski a omis de spécifier car il est exceptionnel -autrement que par plaisanterie ou humour, déjà quasi-poétique- de donner ne serait-ce que deux sens à un sigle : un thème est pourtant fréquemment présent dans ses propos : le JIPTO est l’oeuvre de son esprit, mais il rappelle qu’il est en quelque sorte l’oeuvre de tous. Il est certes pour tous, mais aussi par tous. Tomski exprime ainsi sa dette à tous les créateurs de grands jeux intellectuels classiques. Le JIPTO continue et intègre leurs traditions : usage du plateau, usage de pions, ces piétons ou fantassins de l’armée, soldat à pied (pedo pedonis en latin ...) qui sont inférieurs aux cavaliers, aux guerriers montés, bien plus mobiles.
Le JIPTO simule un jeu de poursuite, comme de la proie par le chasseur ou/et le chien, comme de la cible mobile par un projectile, comme d’un adversaire par un combattant, soldat ou joueur adverse. La poursuite est une modalité essentielle de lutte. Les jeux de lutte sont à leur tour une modalité de combat qui s’apparente à la joute et donc au jeu de guerre à armes courtoises (Kriegspiel, wargame). La joute simule un conflit et n’est pourtant pas conflictuelle pour le bon, sauf à cesser d’être une joute. Si elle est oeuvre de toutes les cultures, c’est que la notion de poursuite, y compris la poursuite sur place, y est d’une extrême généralité. Elle inclut la quête d’un objectif qui se dérobe, que ce soit le but d’un entrepreneur ou d’un homme d’action, d’un opérateur quelconque.
De plus, s’il est vrai que l’auteur du JIPTO revendique la ... poursuite de toute une tradition universelle, il assure avec force y exprimer toutes les particularités d’un terroir civilisationnel, celui du peuple Yakoute, peuple de cavaliers qui, chasseurs, courent après le gibier, guerriers, après l’ennemi; et aussi peuple de pêcheurs quêtant le poisson dans de vastes fleuves, et de coureurs dans d’immenses territoires où les moyens d’existence sont parfois rares et considérablement dispersés. Ainsi le JIPTO est-il marqué aussi d’une totalité (TO) plus spécifique ou plus topique, parce que c’est le produit d’un terroir original et originel.
Le JIPTO est encyclopédique à la façon des mets de terroir, utilisant les ressources locales ou bien universellement accessibles pour faire des repas et des régimes équilibrés gustativement et biochimiquement complets. Il en est ainsi parce qu’ils sont, comme les mets le sont, un produit et un instrument culturel. Il est clair le JIPTO se veut effectivement et se présente comme toticulturel, le JIP total. Il est clair que cette visée profite pleinement des particularités d’une culture ou d’une civilisation pour y prélever à suffisance les ingrédients dont l’interaction fait l’universalité.
La puissance de connotation de la syllabe TO dans JIPTO, qui est l’initiale à deux lettres de tous, total, totalité, totaliser, est floue mais réelle pour peu qu’on songe." (Robert Pagès, Jeux de Paix // EUROTALENT et FIDJIP : Activités et projets pour les enfants surdoués, Editions du JIPTO, 2007, p. 43-45)
La poésie résulte d’une hyperdensité sémantique, i.e. d’un développement particulièrement intense des significations d’un texte à nombre de signes égal. Autrefois, et c’est sans doute un trait de l’espèce humaine, les poètes étaient aèdes i.e. chanteurs. Il y avait donc toujours chez eux, dans leur langage d’apparat, un double signifiant ou support simultané de signification : le texte et la musique. Celle-ci était en général à la fois vocale et instrumentale : la lyre ou la harpe pouvait servir à ces accompagnements, comme aujourd’hui la guitare pour la chanson. Cela faisait trois supports, avec trois lignes principales de signification, conjuguées en correspondance chronologique et tout à fait à l’opposé du texte qui pouvait, comme tel, être univoque. Or, aujourd’hui, dans la poésie non chantée, l’enrichissement sémantique peut se faire, exclusivement, à l’intérieur du texte, à la faveur de plurivalences sémantiques des supports au niveau de composants (signifiants élémentaires) et surtout à celui de compositions diverses des éléments. Ainsi, du coup, l’enrichissement se fait-il par une polysémie ou plurivocité du texte - éventuellement même par la polydoxie- (R.Pagès, 1985-86; J.-M.Monteil, L.Bavent, M.-F.Lacassagne, 1986) i.e. la pluralité, pas forcement cohérente, parfois contradictoire, d’opinion et/ou de sentiments, que le texte transmet ou suscite.Il est donc tout à fait intéressant à cet égard de voir que le titre de l’instrument culturel crée par Tomski comporte, suivant la déclaration expresse de l’auteur, une signification seconde dans laquelle nous voyons un effet de polysémie. Par elle-même et délibérément, elle ouvre la porte de l’ambiguïté, et en annonce la légitimité, en rompant avec la clause généralement convenue d’unicité de sens. Car si -TO dans JIPTO signifie bien Tomski -ce qui souligne l’individualité de l’initiative et le droit d’auteur- il indique aussi la destination, le caractère universel et non singulier de l’instrument culturel : il est pour tous, TOus : des enfants de la maternelle aux adultes chercheurs, i.e. jusqu’au sommet de la culture. Cette signification seconde, explicitée par G.Tomski, figure littéralement dans le sous-titre qui suit JIPTO : Jeux de réflexion pour tous. TOus.
Il y a un autre sens que le Prof. Tomski a omis de spécifier car il est exceptionnel -autrement que par plaisanterie ou humour, déjà quasi-poétique- de donner ne serait-ce que deux sens à un sigle : un thème est pourtant fréquemment présent dans ses propos : le JIPTO est l’oeuvre de son esprit, mais il rappelle qu’il est en quelque sorte l’oeuvre de tous. Il est certes pour tous, mais aussi par tous. Tomski exprime ainsi sa dette à tous les créateurs de grands jeux intellectuels classiques. Le JIPTO continue et intègre leurs traditions : usage du plateau, usage de pions, ces piétons ou fantassins de l’armée, soldat à pied (pedo pedonis en latin ...) qui sont inférieurs aux cavaliers, aux guerriers montés, bien plus mobiles.
Le JIPTO simule un jeu de poursuite, comme de la proie par le chasseur ou/et le chien, comme de la cible mobile par un projectile, comme d’un adversaire par un combattant, soldat ou joueur adverse. La poursuite est une modalité essentielle de lutte. Les jeux de lutte sont à leur tour une modalité de combat qui s’apparente à la joute et donc au jeu de guerre à armes courtoises (Kriegspiel, wargame). La joute simule un conflit et n’est pourtant pas conflictuelle pour le bon, sauf à cesser d’être une joute. Si elle est oeuvre de toutes les cultures, c’est que la notion de poursuite, y compris la poursuite sur place, y est d’une extrême généralité. Elle inclut la quête d’un objectif qui se dérobe, que ce soit le but d’un entrepreneur ou d’un homme d’action, d’un opérateur quelconque.
De plus, s’il est vrai que l’auteur du JIPTO revendique la ... poursuite de toute une tradition universelle, il assure avec force y exprimer toutes les particularités d’un terroir civilisationnel, celui du peuple Yakoute, peuple de cavaliers qui, chasseurs, courent après le gibier, guerriers, après l’ennemi; et aussi peuple de pêcheurs quêtant le poisson dans de vastes fleuves, et de coureurs dans d’immenses territoires où les moyens d’existence sont parfois rares et considérablement dispersés. Ainsi le JIPTO est-il marqué aussi d’une totalité (TO) plus spécifique ou plus topique, parce que c’est le produit d’un terroir original et originel.
Le JIPTO est encyclopédique à la façon des mets de terroir, utilisant les ressources locales ou bien universellement accessibles pour faire des repas et des régimes équilibrés gustativement et biochimiquement complets. Il en est ainsi parce qu’ils sont, comme les mets le sont, un produit et un instrument culturel. Il est clair le JIPTO se veut effectivement et se présente comme toticulturel, le JIP total. Il est clair que cette visée profite pleinement des particularités d’une culture ou d’une civilisation pour y prélever à suffisance les ingrédients dont l’interaction fait l’universalité.
La puissance de connotation de la syllabe TO dans JIPTO, qui est l’initiale à deux lettres de tous, total, totalité, totaliser, est floue mais réelle pour peu qu’on songe." (Robert Pagès, Jeux de Paix // EUROTALENT et FIDJIP : Activités et projets pour les enfants surdoués, Editions du JIPTO, 2007, p. 43-45)